Robots mobiles autonomes (AMR) : pourquoi tant de frilosité en France ?

Robots mobiles autonomes (AMR) en logistique, où en sommes-nous ?

Dans l’un de nos tout premiers articles sur les robots mobiles autonomes (AMR), nous évoquions les déploiements de la start-up Kiva (by Amazon), du français Scallog ou d’Exotec Solutions. Mais si ces 3 grands faiseurs ont poursuivi leur développement, force est de constater qu’il n’y a pas encore d’adhésion réelle des acteurs logistiques au sujet des robots mobiles autonomes (AMR).

Pourtant les réflexions vont bon train. Si certaines entreprises 3PL (logistique tierce ou logistique externalisée) ont sauté tout de même le pas et intégré des robots dans leurs installations existantes, la plupart des projets restent du domaine de l’innovation en matière d’interaction des AMR avec le personnel humain. Dernier en date : l’annonce par Amazon du remplacement de ses robots Kiva emblématiques par une nouvelle version plus « intelligente », baptisée Prothéus, capable de détecter et d’éviter (enfin) les employés.

Qu’en est-il du marché global des robots autonomes ?

Dans son étude d’avril 2019, BIS Research prévoyait une croissance constante de la valeur du marché des AMR d’ici à 2023. Les régions Amérique du Nord, Europe et Asie Pacifique étaient à l’époque toutes concernées par la même dynamique (voir graphique ci-dessous).

Source : Global Mobile Robot Market – Focus on Type and Industry – Analysis and Forecast, 2018-2023 – BIS Research Avril 2019

LogisticsIQ confirme dans son étude de mars 2022 les tendances haussières du marché des robots mobiles (AGV et AMR confondus). Celui-ci devrait atteindre plus de 18 milliards d’ici 2027. Parmi les pays précurseurs, on voit déjà apparaître l’influence des Etats-Unis, de l’Allemagne, du Royaume-Uni, de la Chine et du Japon. Ces pays domineront probablement la production et les usages des robots intelligents dans la prochaine décennie.

Lire aussi notre interview : “Les robots mobiles autonomes (AMR) sont l’avenir de l’industrie et de la logistique”

Comment expliquer la frilosité des Français pour les robots mobiles autonomes AMR ?

1. Un plus fort déploiement d’AMR dans l’industrie

À l’échelle mondiale, la robotique, de manière générale, s’est déployée principalement dans l’industrie. Or en France, c’est un secteur qui s’est historiquement moins développé qu’ailleurs ces dernières décennies, en partie par la délocalisation de ses activités.

2. Un secteur logistique considéré comme un centre de coût

A contrario, la France a su conserver une certaine attractivité pour les activités logistiques. Et avec l’explosion du e-commerce, les enjeux de productivité ne manquent pas. Mais à la différence de l’industrie, la logistique est culturellement encore perçue comme un centre de coût. Les investissements existent, mais ils sont relativement moins fréquents.

3. Des robots mobiles autonomes AMR au ROI incertain

Nous l’avons dit, certains acteurs logistiques sont en train d’étudier la manière d’intégrer des robots mobiles autonomes intelligents de type AMR dans leurs infrastructures. Mais nous sommes encore loin des déploiements à large échelle. Ces dernières années, l’accent a été mis sur des systèmes automatisés aux taux de productivité garantis, que ce soient des robots de type AGV, ou des solutions robotiques opérant en milieu restreint ou fermé, protégé de toute interaction humaine, principalement destinées à l’automatisation du picking.

Le ROI est au premier abord moins évident à démontrer pour des projets AMR, qui, par nature, évoluent dans des environnements ouverts, au milieu des humains.

4.  La sécurité des AMR encore en question

Le fait que les robots mobiles autonomes (AMR) se déplacent au milieu d’êtres humains pose la question de la sécurité. Il y a bien sûr des normes encadrant ces technologies, mais les opérationnels ont encore besoin d’être rassurés quant à la viabilité de tels robots dans leurs environnements. Cela impacte forcément leur déploiement. En tout cas dans un environnement logistique, car en industrie il a toujours été plus facile de dédier des couloirs aux robots. En logistique, le temps est une donnée cruciale : le plus court chemin sera toujours celui de la ligne droite.

5. Chaque technologie a son propre langage

La difficulté des nouvelles technologies robotiques, c’est qu’elles ne répondent pas à un langage universel. Par conséquent, les entreprises qui souhaiteraient les déployer dans leur infrastructure existante peuvent être confrontées à des incompatibilités techniques. Certains systèmes d’information, plus anciens, ne disposent pas tous des connecteurs natifs pour la robotique. On s’aperçoit également sur le terrain que le robot seul ne suffit pas à optimiser les tâches logistiques. Il faut lui adjoindre des technologies complémentaires pour améliorer les usages. Cela multiplie donc d’autant le nombre d’objets qui doivent communiquer entre eux, et se comprendre, pour atteindre les objectifs de productivité recherchés.

Quelle serait la solution de robots mobiles autonomes (AMR) la plus adaptée au marché français ?

Toutes ces contraintes amènent à poser un regard différent sur les robots mobiles autonomes. Pour optimiser leur ROI, les AMR doivent être intégrés aux process métiers et s’adapter aux enjeux réels des entrepôts.

Par exemple, les robots seraient un moyen efficace d’automatiser la fin de chaine. Dans un contexte de pénurie du personnel, il serait plus opportun de concentrer les ressources humaines sur des tâches à forte valeur ajoutée et de confier le transport continu de palettes à des AMR

Une solution logicielle agnostique

Les entreprises souhaitant investir dans des robots mobiles autonomes AMR se retrouvent bien vite dans un schéma bloquant. Ils choisissent une ou deux technologies, mais sont confrontés à de multiples questions : « comment faire pour que tout cela fonctionne ? », « faut-il mettre à jour mon WMS ? », « comment faire pour limiter le coût financier et le temps de transformation de mes systèmes ? »

Si l’on veut déployer des robots AMR rapidement, nous sommes obligés d’avoir une solution agnostique qui fasse l’intermédiaire entre ces technologies innovantes et les systèmes d’information historiques. Sans changer l’existant.

Sur le papier, les robots mobiles autonomes répondent aux principaux enjeux de productivité de la logistique : de fortes pénuries de main-d’œuvre et un nombre croissant de petites commandes e-commerce à traiter en un temps record. Mais les AMR doivent poursuivre leur jeu de séduction dans un secteur logistique historiquement peu enclin à investir.

Des solutions technologiques intermédiaires faciliteront sans doute leur déploiement au sein des infrastructures existantes. Le secteur doit aussi mener une réflexion globale sur les process en entrepôts, afin de sécuriser la cohabitation entre robots autonomes et opérateurs humains à moindres coûts.

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