Révolution 5G – Quel est l’impact d’une connectivité maîtrisée et sécurisée sur les écosystèmes métier ?
Tout seul, on va plus vite. Ensemble, on va plus loin. Ce proverbe africain illustre parfaitement la transformation des écosystèmes métier à venir. Les performances attendues sur les nouveaux standards de connectivité mobile, tels que la 5G, pourraient bien donner un sérieux coup d’accélérateur au modèle de l’industrie 4.0.
Aujourd’hui, avec les réseaux mobiles privés comme le WiFi ou l’IoT, de nombreuses entreprises ont déjà pu tester l’impact des systèmes communicants et apprenants sur les performances de leur activité. C’est le cas par exemple dans l’univers des brasseries traditionnelles où l’utilisation de l’IoT combiné à l’IA a permis d’améliorer par la collecte et l’analyse des données des étapes importantes du processus de fabrication de la bière (voir article[1] de ZDNET).
Prochaine étape : de l’entreprise à l’écosystème communicant
La chaîne de production n’est bien sûr pas le seul périmètre à bénéficier des avantages de ces nouveaux outils du numérique. La data, passée en une décennie de l’ère du “big” à celle du “smart”, trouve aussi bien des débouchés dans la sphère du marketing et des ventes que dans celle des fonctions supports (RH, contrôle de gestion, sûreté…).
Mais jusqu’à présent, les problématiques internes de l’entreprise étaient principalement adressées. Demain, avec les nouveaux standards de connectivité, l’information pourra transiter de manière sécurisée au sein de tout un écosystème métier. Chaque acteur de la chaîne aura alors une vue de sa propre activité, à l’aune de facteurs exogènes. Par exemple, comme le montre le schéma ci-dessous, une unité de fabrication pourra anticiper les retards de livraison de la matière première chez son fournisseur et optimiser ses lignes de production dans l’intervalle. La connaissance fine de la situation de chaque partie prenante permettra à chacun de prendre de meilleures décisions pour sa propre activité.
(source Ericsson)
Les bénéfices de la 5G associés à 3 catalyseurs pour transformer les écosystèmes métier
Le discours autour de la 5G se concentre souvent sur la notion de débit. Le “saut” sera effectivement considérable, puisqu’on passera d’un débit pratique de 100 Mb/s pour la 4G à 1 Gb/s pour la cinquième génération des réseaux mobiles. Mais ce n’est pas le seul élément d’intérêt pour les entreprises.
Alors que sur les réseaux actuels 4G mutualisés, l’accès pour les usages grands publics et professionnels répond aux mêmes garanties, la 5G amènera le concept de “network slicing” : c’est le fait de pouvoir utiliser un même réseau avec des niveaux de criticité différents selon les usages. On parle alors de “tranches de réseau”. Par exemple, dans l’univers de l’automobile et du véhicule connecté, les nouveaux standards permettront à la fois aux applications anti-collisions (qui demandent une faible latence et un niveau de criticité maximal) et aux lecteurs multimédias des passagers (qui demandent beaucoup de débit, mais peuvent supporter des variations de qualité du réseau) d’utiliser les mêmes ressources réseau en parallèle. La 5G permettra donc d’agréger à la fois les bénéfices des technologies cellulaires (couverture, sécurité, terminaux, coûts) et les garanties élevées des réseaux privés dédiés actuels.
Mais pour impacter favorablement tout un écosystème métier dans sa transformation digitale et favoriser l’interopérabilité des acteurs, la 5G doit être accompagnée de plusieurs catalyseurs. Pour ma part, j’en recense trois :
1) Un environnement ouvert, sécurisé et sous contrôle
Au sein d’un écosystème métier donné, nous pouvons remarquer que le nombre de standards créés est très important et est un frein à l’interconnexion des systèmes d’information entre différentes entreprises. Pour y remédier, les API mises à disposition permettent la création d’applications regroupant des informations de diverses sources. Lorsque ces APIs ne sont pas déjà existantes, il y a alors la place à des acteurs spécialisés de « créer » cette interopérabilité. Des start-up commencent d’ailleurs déjà à se positionner sur ce créneau. C’est notamment le cas de la solution de l’entreprise lyonnaise Wattsense qui s’interface et communique à distance avec tous les équipements existants de gestion technique des bâtiments (chauffage, climatisation, gestion de l’eau…), quels que soient leur marque, leur modèle ou leur âge, pour proposer des solutions de Smart Building aux bailleurs immobiliers notamment. Ce module électronique pluri-technologique qui s’installe en local comme une box leur permet de gérer leur parc immobilier à distance, de façon cohérente et sécurisée, malgré les multiples protocoles de communication utilisés.
2) Des plateformes d’enrichissement de l’information
Certains secteurs industriels, comme le transport et la logistique, se retrouvent au croisement de plusieurs écosystèmes métier. L’acheminement des biens répond à la fois à des problématiques de transport multimodal, d’anticipation des opérations de chargement et de déchargement dans les entrepôts, et de relations client dématérialisées. L’ouverture sécurisée des systèmes d’information permet à des plateformes de la datatech, telles que le Français Shippeo, d’apporter leur savoir-faire en matière d’agrégation et d’enrichissement des données pour créer de nouveaux services à valeur ajoutée.
3) Des applications métiers spécifiques
À partir des standards et des APIs développés au sein de chaque verticale, les entreprises pourront développer leurs propres applications métiers, sans se soucier des contraintes d’interopérabilité. Si les données disponibles proviennent à la fois de l’interne et de l’environnement externe, chaque acteur n’en garde pas moins la maitrise de son périmètre logiciel et de ses besoins fonctionnels.
Le cas pratique de l’aéroport
La plateforme aéroportuaire est un bon exemple d’écosystème qui bénéficiera des apports de la 5G. Un aéroport, c’est plus de 120 000 personnes au sein de 1000 entreprises de toutes tailles, n’ayant pas les moyens (financiers, matériels et opérationnels) de déployer chacune son propre réseau mobile privé. Cet écosystème a un avantage : il concentre sur un périmètre géographique restreint l’ensemble des acteurs (compagnies aériennes, gestionnaire d’infrastructure, sous-traitants bagages, entreprises de catering, fueling, maintenance avion, etc.). La 5G permettra donc de répondre aux enjeux actuels et futurs des aéroports (sécurité des opérations, taux de rotation des avions et capacité des aéroports) en permettant le développement d’applications innovantes et transverses, dans le cadre d’une compétition internationale de plus en plus forte. La 5G sera aussi l’occasion de donner vie à des cas d’usages encore prospectifs, comme l’autonomie des avions durant les phases de roulage, des véhicules de piste et de transport de passagers, le contrôle des drônes de surveillance, la maintenance avec réalité augmentée ou l’analyse comportementale d’une foule.
En résumé, les écosystèmes métier se trouvent confrontés à de nombreux besoins critiques nécessitant un réseau d’accès mobile très haut débit, mais adapté aux enjeux des professionnels. Ces besoins réseau sont couplés avec une interopérabilité et l’enrichissement des SI permettant la création d’applications innovantes. En attendant le network slicing 5G qui n’arrivera pas avant 5 ans, les entreprises pourront s’appuyer sur la bande 2,6 GHZ TDD récemment libérée par l’ARCEP, couplée à la technologie LTE Advanced Pro aussi appelée « 4,9G ». Ce dispositif devra permettre de combler le saut technologique entre des réseaux devenus obsolètes (Tetra, DECT) ou inadaptés (4G, Wifi) et une révolution 5G en cours de standardisation (uRLLC, mMTC).
[1] https://www.zdnet.fr/actualites/quand-l-ia-et-l-industrie-40-viennent-au-secours-de-la-biere-traditionnelle-39883783.htm