Paris-Orly rassemble dans un APOC unique la supervision digitale de l’aéroport
C’est une première en Europe ! L’aéroport Paris-Orly (Groupe ADP) concentre depuis quelques mois toutes les fonctions du PC Sécurité, du PC Sûreté et du Centre de Commandement au sein d’une même infrastructure : l’APOC, pour AirPort Operations Center. Née sous l’impulsion d’Eurocontrol, la superstructure qui gère le réseau de transport aérien européen, l’idée de l’APOC est d’offrir aux aéroports la capacité technologique et organisationnelle de piloter la performance des opérations sur leur plateforme et de mieux gérer les crises. À la clé, une plus grande fluidité, davantage de ponctualité et une satisfaction passager améliorée sur l’ensemble du réseau aérien européen.
Un partage de l’information en temps réel
La visite de l’APOC de Paris-Orly est impressionnante. Le site regroupe sur 1200 m2 plus de 250 salariés experts sur les trois grands process de l’aéroport (avions, technique et bagages, et passagers), avec un armement qui oscille entre une dizaine d’opérateurs au plus bas la nuit et un maximum de 26 collaborateurs en journée.
“Avant la création de l’APOC, Paris-Orly disposait de 7 centres de supervision éclatés sur des sites différents”, explique Mikaël Ferrer, Responsable Pilotage Opérationnel APOC. “Ils communiquaient tous entre eux, mais la coordination de l’information et de la prise de décision était plus difficile. Le fait d’ouvrir le bâtiment de jonction de l’aéroport, de passer à un terminal unique, a inspiré la réflexion sur la refonte de notre organisation. En passant sur une infrastructure unique, il devenait cohérent d’avoir un seul et même centre opérationnel pour l’ensemble de l’aéroport.”
L’usage des technologies au service de la décision
Chacune des grandes familles de métier de l’aéroport est ainsi représentée. Il y a celle de la production, les métiers qui contribuent à mettre à disposition les ressources nécessaires pour la bonne gestion du trafic. Par exemple les collaborateurs qui affectent des vols sur les postes avions et qui ajustent les plannings en cas de retards. On retrouve également sur l’APOC les fonctions de supervision, ce sont tous les métiers qui supervisent de manière proactive les jalons importants des parcours, les temps d’attente, la fluidité des différents points de contrôle, etc.
“Ici, chacun est responsabilisé dans son cœur de métier, commente Mikaël Ferrer. Nous avons des collaborateurs qui vont gérer la fluidité des aérogares, d’autres qui vont gérer la fluidité routière, certains vont gérer tout le trafic avions, d’autres la bonne performance des équipements techniques… Bref, une multitude de métiers qui travaillent tous autour d’un objectif commun, celui de piloter la performance de son process au service de la performance globale de la plateforme.”
La dernière fonction est celle de la décision. “Il faut bien avoir à l’esprit que l’APOC est une instance de décision, de pilotage des opérations”, rappelle Mikaël Ferrer. “Pour ce faire, nous avons créé un nouveau métier qui n’existait pas dans l’entreprise, le Décideur Opérationnel (DO). Il est le pilote en temps réel des opérations, le grand coordonnateur des process. C’est lui qui garantit la performance globale à la Direction de l’aéroport d’Orly.”
Du machine learning pour fluidifier l’embarquement
L’APOC est un concentré de tout ce qui se fait de mieux en matière de technologies digitales. Les opérateurs ont à leur disposition neuf murs d’images, dont six dédiés à la supervision, deux au plateau CDM et un au PC Crise. Le Décideur Opérationnel (DO) a à sa disposition des éléments pour anticiper les dysfonctionnements, prendre des décisions en temps réel et préparer avec ses équipes le retour à la normale en cas d’évènements majeurs.
“Tous nos parcours passagers, avions et bagages sont de plus en plus digitalisés”, explique Mikaël Ferrer. “Cela nous permet de voir en détail le niveau de performance de chaque jalon, tout en ayant la hauteur de vue, la prise de recul nécessaire pour voir le système dans son ensemble et analyser sa performance en sortie.”.
Dans le cadre de la recherche et développement nous avons pu effectuer des tests et obtenir des résultats avec les machines learning. Grace à ces machines, nous pourrons prédire les temps d’attente aux différents points de contrôle de l’aéroport, en fonction d’un historique de données sur des situations similaires à celles constatées en réel. La production de la machine learning sera lancée dans un future proche, cela va nous permettre d’anticiper les retards à l’embarquement, d’affiner les départs des vols et de prendre les dispositions qui s’imposent pour fluidifier les parcours en amont. Ce dispositif prédictif, a bénéficié du programme SESAR d’Eurocontrol qui vise à soutenir et à financer les innovations qui permettent de rendre les opérations aéroportuaires plus efficaces.”
Des premiers retours d’expérience positifs
Il est encore trop tôt pour faire un premier bilan quantitatif, mais d’ores et déjà quelques évènements ont mis en exergue la puissance de l’APOC pour coordonner les métiers et prendre rapidement des décisions. Par exemple, lors d’un cas de suspicion d’explosifs dans des chaussures, c’est tout le process Départ d’Orly Sud qui s’est retrouvé peu à peu à l’arrêt. Avec la nouvelle organisation centralisée de l’APOC, l’information a circulé beaucoup plus vite entre les différents acteurs du Groupe ADP. Le fait d’être réuni géographiquement au même endroit facilite les échanges, les analyses, les recoupements. De fait, l’APOC a réussi à gérer l’impact de la fermeture des zones d’embarquement en temps réel, en s’organisant de manière à ce que les adjoints du Décideur Opérationnel s’occupent de l’instant T pendant que lui préparait le retour à la normale.
Cette capacité à remonter, à corroborer et à agréger autant de données émanant d’une multitude d’acteurs aéroportuaires, de corps et de métiers différents, sur une zone aussi sensible que complexe à gérer, fait des émules. “Nous avons beaucoup de demandes de visite de l’APOC”, reconnait Mikaël Ferrer. “Nous recevons des professionnels de tous horizons qui souhaitent évaluer les capacités que nous avons eues à innover, du point de vue technologique et organisationnel, la manière dont nous avons cherché à améliorer nos interfaces pour traiter facilement l’information et la redispatcher efficacement. L’aéroportuaire n’est pas le seul secteur en demande d’un tel centre de supervision et de décision. On observe de fortes attentes de la part du secteur public, des grandes métropoles, de la Défense et des ports.”
À terme, l’ensemble des grands aéroports européens devraient se doter d’un APOC pour répondre efficacement à l’accroissement du trafic aérien. Le concept fait également son chemin dans d’autres secteurs d’activité. Toujours est-il que la clé d’un tel dispositif n’est pas qu’organisationnelle. Les technologies réseau, souvent invisibles, doivent être suffisamment robustes, capacitaires et résilientes pour utiliser le plein potentiel d’un APOC.