La fin programmée du réseau cuivre : pourquoi votre entreprise ne peut plus attendre
2030, c’est dans 5 ans. Ça peut sembler loin, mais pour une migration technologique d’envergure, c’est demain. Si vous pensez encore avoir le temps, détrompez-vous : les premières communes ont déjà basculé en janvier dernier, et le mouvement s’accélère.

- Un calendrier qui ne plaisante pas
- « Mais j’ai encore le choix, non ? »
- Les alternatives : du grand écart technologique
- Vos inconvénients sont-ils vraiment des obstacles ?
- À chaque entreprise sa solution
- Pourquoi les entreprises traînent-elles autant ?
- Comment réussir sa migration sans stress
- L’Europe nous regarde
- Le moment de vérité
Un calendrier qui ne plaisante pas
Vous vous souvenez peut-être de Vanves, Guyancourt ou Saint-Leu ? Ces communes ont vécu en direct, le 31 janvier dernier, la coupure définitive de leur connexion ADSL. Pas de dernière chance, pas de sursis : fini, terminé. Et c’est exactement ce qui attend toutes les entreprises françaises d’ici 2030.
Orange ne fait pas dans la demi-mesure. Le planning est millimétré : 162 communes dans un premier temps, puis 892 communes en janvier 2026, et enfin 2 145 communes un an plus tard. Au final, 42 millions de lignes vont disparaître. Oui, vous avez bien lu : 42 millions. (1)
Pour plus de 4 millions d’entreprises et 10 millions de lignes professionnelles, c’est le grand saut obligatoire. Et entre nous, beaucoup ne s’y attendaient pas si tôt.
« Mais j’ai encore le choix, non ? »
Alors là, soyons clairs : non. Zéro choix. Quand Orange dit « on coupe », on coupe. Point final.
Certes, certains dirigeants jouent la montre. « On va voir », « on laisse quelques lignes inactives pour tester », « on avisera plus tard ». Sylvain Plagne, directeur marketing de Bouygues Telecom Entreprises, confiait dans une interview du JDN, en avril 2025 (*), que même lors de la première vague très médiatisée, environ 10% des sociétés se sont quand même fait surprendre. Imaginez maintenant, avec des lots plus importants incluant des villes comme Ajaccio, Melun ou même un arrondissement de Lyon…
Le problème, c’est que plus vous attendez, plus les prestataires seront débordés. Et en solution de dernier recours, même si les opérateurs peuvent déployer un routeur 4G en quelques heures, ils ne pourront pas équiper tout le monde dans les derniers jours. C’est mathématique.
Même si le réseau cuivre ne s’arrête pas encore partout, il est condamné à disparaître. Et cette fin programmée entraîne une autre réalité : le coût du cuivre ne cessera d’augmenter jusqu’à sa destruction complète. Chaque année, son entretien devient plus cher, son exploitation moins rentable, et les offres basées dessus perdent de leur intérêt. Miser sur le cuivre aujourd’hui, c’est payer plus cher pour une technologie en fin de vie.
Les alternatives : du grand écart technologique
Bon, maintenant qu’on a établi qu’il faut y aller, regardons ce qui existe.
La fibre : la star incontournable
- La fibre mutualisée (FTTH), c’est un peu comme passer de la 2CV à la berline moderne. Initialement pensée pour nos maisons, elle s’ouvre aux entreprises depuis 2020. Et là, c’est le jour et la nuit par rapport à l’ADSL : débits jusqu’à 1 Gb/s, stabilité, avec en plus des garanties de service qui vont de 8h d’intervention à 4h de rétablissement 24h/24.
Ce qui a changé la donne ? Les prix. Parce qu’au début, c’était prohibitif. Mais depuis 2024, plusieurs opérateurs ont cassé leurs tarifs. Résultat : on se rapproche enfin des anciens prix SDSL.
- La fibre dédiée (FTTO), elle, c’est la Rolls des connexions. Déployée spécialement pour vous, avec des engagements de service avec un haut niveau d’exigence. Débits qui peuvent grimper à 10 Gb/s et plus, redondance, monitoring… Évidemment, ça coûte plus cher, mais pour une ETI ou un grand compte, c’est souvent indispensable.
L’avantage de la fibre ? Elle fait tout mieux que le cuivre. Débits symétriques (enfin !), latence ultra-faible, fiabilité éprouvée, et surtout, elle est « future-proof ». Dans 10 ans, quand on aura des usages qu’on n’imagine même pas aujourd’hui, elle suivra et sera toujours à la hauteur.
Les inconvénients ? Il faut revoir toute son architecture réseau, former les équipes, et oui, ça coûte plus cher au départ. Mais au fond le vrai risque, c’est de miser sur une solution qui demain, sera tout, sauf adaptée aux besoins.
Les solutions de « dépannage »
- Les routeurs 4G/5G, c’est pratique pour les sites isolés ou en attendant mieux. On atteint maintenant 100-300 Mb/s en 4G, et la 5G peut dépasser le gigabit. Le hic ? Les coûts peuvent vite s’envoler selon votre consommation, et il faut négocier des forfais pros adaptés.
- Le satellite nouvelle génération a fait des bonds de géant. Starlink et consorts proposent maintenant du 500 Mb/s avec une latence sous 50ms. Parfait pour un bureau isolé en montagne où il serait difficile de déployer la fibre. Mais moins pertinent pour un siège social dans une grande ville où la fibre est déjà disponible, plus stable, et offre des garanties de service que le satellite ne peut pas toujours proposer.
- Les faisceaux hertziens, c’est plus technique, mais ça marche très bien pour relier deux bâtiments par exemple. Du point-à-point radio qui peut être très performant. A condition d’avoir une ligne de vue dégagée, et de ne pas dépasser quelques kilomètres de distance.
Mais soyons honnêtes : pour 90% des entreprises, la vraie solution, c’est la fibre. Les autres technologies, c’est pour des cas particuliers ou en complément.
Vos inconvénients sont-ils vraiment des obstacles ?
« Oui, mais c’est cher », « oui, mais c’est compliqué », « oui, mais on n’a pas le temps »… On entend souvent ces objections. Mais regardons de plus près.
- L’investissement initial ? Les économies arrivent vite. Vous rationalisez vos lignes (la fibre peut porter la voix et la data), vous accédez à de nouveaux services, vous réduisez vos coûts de maintenance.
- La complexité technique ? C’est justement l’occasion de faire le tri dans votre IT. Un bon intégrateur transforme cette contrainte en opportunité de modernisation. Et puis, les nouvelles interfaces sont généralement plus simples que les vieux systèmes.
- Les délais ? Si vous vous y prenez 18 mois à l’avance, aucun stress. Le problème, c’est de s’y prendre 3 mois avant.
- La formation ? Plutôt qu’un frein, vos équipes y verront une opportunité de découvrir des outils plus modernes, plus ergonomiques et plus efficaces.
Au final, le seul vrai « passage obligé », c’est de repenser votre téléphonie. Votre vieux PABX va devoir évoluer. Mais même là, c’est l’occasion de passer au cloud et de gagner en flexibilité.
À chaque entreprise sa solution
Les petites structures (5-20 personnes)
Vous êtes un cabinet dentaire, un petit commerce, un cabinet comptable ? Votre solution, c’est simple : fibre mutualisée + téléphonie dans le cloud.
Les PME établies (20-250 personnes)
Là, on monte d’un cran. Fibre dédiée avec quelques garanties de service, et soit un IPBX moderne, dans vos locaux, soit une solution téléphonique hébergée dans le cloud. Un investissement financier certes, mais en contrepartie, vous aurez une infrastructure qui va tenir 10 ans et qui peut grandir avec vous.
Les grandes structures (250+ personnes)
Pour vous, c’est fibre dédiée haut de gamme avec redondance, architecture cloud hybride, le grand jeu. En effet, il s’agit d’un investissement financier important, mais vous ne jouez pas dans la même cour. Haute disponibilité, sécurité renforcée, intégration avec vos systèmes métier… C’est votre outil de production.
Pourquoi les entreprises traînent-elles autant ?
C’est le paradoxe français. Nos particuliers ont massivement adopté la fibre – on a d’ailleurs le meilleur taux de couverture d’Europe avec 91% fin 2024 (contre 73% en moyenne européenne et seulement 42% en Allemagne). Mais côté entreprises ? 75% seulement sont raccordées, et on n’a progressé que de 12% en 2024. On peut mieux faire !
Le grand malentendu
Pendant longtemps, on ne proposait aux entreprises que de la fibre dédiée hors de prix. Résultat : beaucoup restaient sur leur SDSL pas cher. Ce n’est qu’en 2020 que l’Arcep a poussé pour ouvrir les réseaux FTTH (ceux des particuliers) aux professionnels. Du coup, il y a un rattrapage à faire.
Autre problème : le multi-accès. En gros, pouvoir avoir plusieurs connexions internet dans le même bureau. Sur le cuivre, cela ne pose pas de problème mais sur la fibre les opérateurs ne le proposaient pas tous jusqu’à fin 2024. Ce qui est très récent !
Et puis, pouvez-vous l’imaginer ? 48% des dirigeants ne savent toujours pas que le cuivre va fermer. C’est incroyable ! 20% estiment que les offres actuelles ne correspondent pas à leurs besoins. Il y a clairement un problème de communication et d’adaptation de l’offre.
Les zones denses à la traîne
Bizarrement, c’est dans les grandes villes que ça progresse le moins. En rural, grâce aux réseaux publics, ça bouge. Mais à Paris, Lyon, Marseille ? Ça stagne. Peut-être parce que les entreprises urbaines ont l’impression d’avoir le choix, ou parce que la concurrence est telle qu’elles attendent la meilleure offre.
Comment réussir sa migration sans stress
D’expérience, les projets qui se passent bien suivent toujours le même schéma.
Étape 1 : L’état des lieux (2-3 mois avant tout)
Il faut être méticuleux. Faites le tour de tous vos sites, listez tous les équipements branchés sur vos prises en T. Et attention aux oubliés : l’ascenseur, les terminaux de paiement, la machine à affranchir, l’interphone, le système d’alarme… Ça peut paraître bête, mais le jour J, si votre ascenseur ne fonctionne plus, vos clients vont le remarquer.
Étape 2 : Dessiner l’avenir (1-2 mois)
Une fois que l’on sait ce que l’on a, on définit ce que l’on veut. Quel débit ? Quelles garanties ? Quelle architecture téléphonique ? Est-ce que l’on garde notre standard ou bien passe-t-on dans le cloud ? C’est le moment de rêver un peu et de se projeter à 5 ans.
Étape 3 : La réalisation (3-6 mois)
Commande des liaisons, installation des équipements, migration progressive… C’est là qu’un bon prestataire fait la différence. L’idée, c’est de basculer service par service, sans jamais couper complètement.
Étape 4 : L’optimisation continue
Une fois que tout fonctionne, c’est le moment d’exploiter les nouvelles possibilités. Télétravail fluide, visioconférence HD, nouveaux services cloud…
L’Europe nous regarde
Il faut réaliser la chance que nous avons. Avec notre taux de couverture fibre de 91%, la France fait des envieux en Europe. L’Allemagne, notre voisin et concurrent économique direct, plafonne à 42%. C’est un avantage concurrentiel énorme, à condition de l’exploiter.
L’Arcep l’a bien compris avec sa stratégie « Ambition 2030 ». L’idée ? Utiliser cette transition cuivre-fibre pour dynamiser la concurrence, faire baisser les prix, et proposer des offres adaptées à chaque type d’entreprise. Et ça marche : depuis 2024, les tarifs baissent, l’offre se diversifie, les opérateurs alternatifs se développent.
Le moment de vérité
Pour finir, cette migration du cuivre vers la fibre, c’est bien plus qu’un changement technique. C’est votre ticket d’entrée dans l’économie numérique des 10 prochaines années. Télétravail hybride, intelligence artificielle, IoT, cloud computing… tout ça nécessite une connectivité de qualité.
Les entreprises qui s’y prennent maintenant, avec méthode et ambition, vont prendre une longueur d’avance. Celles qui attendent… eh bien, elles subiront la transition dans l’urgence, probablement plus cher et avec plus de stress.
Alors, on s’y met quand ?
(1) – https://www.inc-conso.fr/content/le-demantelement-du-reseau-cuivre-par-orange?
(*) – source principalement utilisée dans cet article : https://www.journaldunet.com/web-tech/1540143-fin-du-reseau-cuivre-comment-les-entreprises-doivent-se-preparer/?